Un enjeu environnemental clé des prochaines élections: les émissions de méthane au Canada

Votre vote pourrait bien faire la différence pour cet enjeu clé et méconnu ! Nos émissions de méthane peuvent compromettre tous nos autres efforts pour nous attaquer aux changements climatiques.

Nous avons tous entendu parler des gaz à effet de serre (GES) et du principal GES: le dioxyde de carbone (CO2). Mais qu’en est-il du méthane, le composant principal du gaz naturel ?  Le méthane est probablement le plus dommageable des GES quand on tient compte de la quantité émise par les humains et de son impact à court terme. Sur une période de 20 ans, le méthane a 84 fois plus d’impact sur le climat que le CO2. En d’autres termes, une tonne de méthane équivaut à 84 tonnes de CO2.

Par conséquent, même si les Canadiens produisent beaucoup moins de méthane que de CO2, son impact est dramatique. En 2017, les Canadiens ont produit 558 millions de tonnes de CO2 et 3,8 millions de tonnes de méthane. Cependant, cette quantité de méthane aura autant d’impact que 319 millions de tonnes de CO2 pour les 20 prochaines années (soit 57% de l’impact de tout le CO2 émis au Canada)!  À l’échelle mondiale, on estime que 25% des changements climatiques à ce jour résultent d’émissions de méthane d’origine humaine.

Voilà pourquoi les nouvelles réglementations canadiennes sur les émissions de méthane adoptées par le gouvernement libéral et qui entreront en vigueur à partir de 2020 sont si importantes. Elles doivent permettre de réduire ces émissions de 40 – 45% : un impact incroyable obtenu sans vraiment rien changer à nos habitudes actuelles. Alors pourquoi est-ce que j’en parle ? Parce que ces réglementations pourraient bien ne jamais être mises en vigueur. Certaines pétrolières bataillent fort en coulisse pour les faire disparaître. Et ce même si les fuites et déversements de cette industrie, surtout liés à l’extraction et au transport du gaz naturel, sont responsables de 44% des émissions canadiennes d’origine humaine (voir figure 1) !

Figure 1: Sources d’émission de méthane d’origine humaine au Canada (2014)

Source: Environnement Canada

Ces nouvelles réglementations sont-elles déraisonnables ? Pas du tout ! Le méthane récupéré est le composant principal du gaz naturel … que les pétrolières vendent ensuite à profit. La plupart des investissements nécessaires se rentabilisent ainsi en moins de trois ans, ce qui est plus qu’ intéressant dans une industrie qui pense plutôt en termes de 20 et 30 ans. De fait, même les chefs de file de l’industrie conviennent que les règlements proposés sont acceptables et viables.

Alors, d’où vient le problème ? Du Sud bien sûr ! À l’origine, le Canada et les États-Unis s’étaient engagés à appliquer des règles et des normes similaires. Mais l’Agence de protection de l’environnement (EPA) de Trump a décidé de revenir sur cet engagement, malgré l’opposition de 13 États à la décision de l’EPA. Les pressions sur le gouvernement fédéral canadien vont donc certainement s’accentuer au cours des prochains mois pour retarder ou annuler la mise en œuvre de ces règles. Et si vous pensez qu’un parti politique ou l’autre au pouvoir ne changera rien à l’attitude du gouvernement en la matière, pensez aux bastions politiques des grands partis et jetez un coup d’œil à la carte présentée ci-après (figure 2).  

Figure 2

Source: Environnement Canada

Quoi de plus facile que de retarder l’entrée en vigueur de ces réglementations pour un nouveau gouvernement ? On parle de la « nécessaire harmonie avec les normes américaines », on glisse deux paragraphes dans un immense règlement omnibus, et on ne provoque même pas une réaction de trois lignes en page 27 des grands journaux !

Notre soutien à la mise en place de ces réglementations sur le méthane constitue donc probablement notre geste concret le plus important et le plus simple à poser pour réduire des émissions de GES. Comme le dit Drew Nelson, expert mondial en méthane: «La réduction des émissions de méthane provenant des hydrocarbures est la mesure la plus efficace que nous puissions prendre pour prévenir le réchauffement climatique aujourd’hui. Si tous les pays du monde suivaient la réduction de méthane du Canada, cela aurait l’impact climatique de fermer un tiers des centrales électriques au charbon du monde. »

Faisons donc de la réglementation sur le méthane un enjeu clé de notre vote aux prochaines élections. À vous de tirer vos conclusions !

Pour ma part, j’appuie le parti libéral et je travaille comme bénévole pour Steven Guilbeault, l’écologiste bien connu et candidat libéral dans Laurier Ste-Marie.

4 thoughts on “Un enjeu environnemental clé des prochaines élections: les émissions de méthane au Canada

  1. Rémi Lemieux

    Merci Bernard,
    Je crois que nous avons besoin de l’effort de tous pour éviter le pire. Grâce à ton travail nous serons mieux informés et agirons plus efficacement.

  2. Gildas

    Bonjour Bernard – Savez vous de quels processus est issu le méthane lié au pétrole et au gaz ? Est ce que c’est au moment du raffinage ? Ou lors du transport des produits pétroliers ou gaziers (fuites) ? Merci

    Gildas

    1. Bernard Post author

      Bonjour. Le méthane s’échappe à tous les stades, de l’extraction jusqu’à son utilisation après transport. Il s’échappe notamment des puits lors de l’extraction par fractionnement des schistes bitumineux. Il s’échappe tout au long du transport du gaz naturel, jusque dans les villes où il est distribué. Comme il est inodore et incolore, les fuites ne sont pas apparentes, et il peut être « tentant » pour les délinquants de couper au plus court. Les « déversements volontaires » sont fréquents. Il est bien établi que les fuites sont en réalité deux à trois fois plus importantes que celles rapportées par l’industrie. C’est pourquoi des normes plus sévères et des contrôles réguliers sont si importants.